Lu sur Nice-Matin :
http://www.nicematin.com/article/faits-divers/les-soeurs-de-roquebrune-sortent-de-leur-retraite
Les sœurs de Roquebrune sortent de leur retraite.
Publié le samedi 07 août 2010 à 11H43
« Nous dépendons du droit canon. Si une de nos supérieures nous croise dans la rue et nous ordonne de monter dans une voiture, nous n'avons pas d'autre choix que d'obéir. »
C'est ainsi que sœur Marie-Daniel, l'une des trois religieuses de Saint-Joseph à Roquebrune-Cap-Martin, a expliqué les raisons de sa fuite à sa nièce au sortir de sa retraite forcée.
Au mois de juillet dernier, le sort de ces religieuses octogénaires avait ému toute la France : leur congrégation leur intimait l'ordre de quitter leur domicile, mis en vente pour 1,11ME, afin de rejoindre une maison de retraite en Ardèche.
Une injonction vécue comme une sanction par ces religieuses qui ont œuvré pendant près de 50 ans dans leur commune pour créer l'un des plus beaux établissements scolaires privés de l'Est du département. La plus âgée d'entre elles, sœur Maurice-Marie, a même été promue officier de la Légion d'honneur. Une distinction reçue des mains du cardinal Poupard, venu spécialement de Rome l'an dernier pour l'occasion.
C'est dire si cette décision a été durement ressentie à Roquebrune. Amis et anciens élèves se sont mobilisés, formant un collectif avant de lancer une pétition qui a réuni plus de 500 signatures.
Recherchées par la police
Des démarches qui n'ont aucunement fait fléchir les responsables de la congrégation Saint-Joseph, basée à Saint-Peray. Elles ont, au contraire, accentué la pression sur les sœurs.
L'un d'entre elles, Sœur Saint-Denis, avait alors évoqué le « harcèlement » que toutes trois subissaient. C'est à ce moment qu'elle a pris, avec sœur Marie-Daniel, la décision de quitter leur maison roquebrunoise sans laisser d'adresse. En fait, elles ont été discrètement accueillies à Menton chez des amis. Sœur Maurice-Marie n'avait pu les suivre en raison d'une hospitalisation consécutive à une chute.
Une fuite que leur maison mère n'a pas franchement appréciée. Faisant même appel à la police nationale et envoyant un émissaire à Roquebrune pour taper à toutes les portes.
« Nous avons été accusés par la congrégation de séquestration, de manipulation mentale et même d'abus de faiblesse, raconte une proche des sœurs. Mais la visite de la police a finalement été un soulagement. Nous avons ainsi pu prouver que notre démarche était pure. »
En dépit de toutes ces péripéties, une trêve vient d'être conclue.
La congrégation a en effet accordé à Sœur Marie-Daniel et Sœur Saint-Denis un congé de quatre semaines au sein de la communauté des sœurs missionnaires de Menton.
Des « vacances » qui se termineront cependant devant le tribunal ecclésiastique de Lyon auquel il appartient désormais de trancher.
L'entourage ne croit pas à la trêve
Les proches des religieuses restent sceptiques face à cet apparent apaisement. « Nous respectons la trêve mais qu'en est-il pour la congrégation ? », s'interroge Odile Tallent, nièce de Sœur Marie-Daniel. Une inquiétude partagée par les habitants de l'impasse du Moulin dans laquelle se trouve la maison des sœurs, l'Eau Vive. Et pour cause. « Deux sœurs de Saint-Peray se sont installées dans la maison à la mi-juillet. Depuis, on voit toute sorte de choses en sortir. Des outils de jardinage, mais aussi des draps, des couvertures, des matelas. Que feront les sœurs si elles reviennent et trouvent la maison vide ?,» se demandent-ils. Un autre point a mis la puce à l'oreille du voisinage. La supérieure de Saint-Peray leur a en effet demandé de retirer la chaîne qui ferme le parking attenant à la maison. Pour y faire venir un camion de déménagement ? « Nous n'accepterons pas que la maison soit vidée en l'absence des sœurs, » prévient Odile Tallent. En attendant le verdict de la cour ecclésiastique de Lyon, les Roquebrunois retiennent leur souffle mais restent vigilants.
Marion courtassol mcourtassol@nicematin.fr
