Roselyne Bachelot nous l'avait bien dit : pour faire face à la grippe du cochon il faut se laver les mains.
Conseil suivi à la lettre par les policiers et magistrats du GIR SUD-EST.
Enquête
De nouveaux élus visés par l'opération "mains propres"
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Le coup de filet vire à l’opération « mains propres ». L’onde de choc provoquée mardi par l’interpellation au petit matin de Gérard Spinelli (1), le maire de Beausoleil, ainsi que d’une quinzaine de personnes (dont de présumés mafiosi et des grands patrons du BTP azuréens) se propage. La première secousse judiciaire avait tout à la fois ébranlé les milieux politiques, le petit monde des affaires, ainsi que les rangs du grand banditisme. Notables et voyous logés à la même enseigne policière (notre édition précédente).
Hier, sur fond d’enquête tentaculaire sur des délits présumés de blanchiment et de corruption, c’est une seconde série d’arrestations qui a émaillé la journée.
L’épouse et une fille du sénateur René Vestri
De Menton et Beausoleil, l’enquête diligentée en juin dernier par le juge Duchaine (lire portrait ci-dessous) s’est, en effet, déplacée à la périphérie de Nice.
Tout d’abord à Berre-les-Alpes, petite commune de 1 200 habitants de la vallée du Paillon où le maire, Maurice Lavagna, également patron d’une petite société de BTP, a été interpellé. Tout comme son fils Franck, également placé en garde à vue. Mais aussi, à Saint-Jean-Cap-Ferrat où l’intérêt des enquêteurs semble se focaliser. On apprenait que dès mardi, Marjorie Vestri, l’une des filles du sénateur-maire UMP de la presqu’île y avait déjà été arrêtée.
Et, hier, c’est à sa descente d’avion, à Nice, que Lucette Vestri, l’épouse du sénateur, était à son tour interpellée, juste après avoir satisfait aux formalités douanières. Comme ils en ont pris l’habitude depuis quelques mois, le premier magistrat de Saint-Jean et son épouse venaient de passer quelques jours à Dubaï. Bénéficiant de son immunité parlementaire, René Vestri, manifestement effondré, a quitté seul l’aéroport Nice-Côte d’Azur.
Si ce dernier n’a pas été inquiété, ce ne fut pas le cas d’un autre de ses proches, Jean Berthet, 72 ans, ancien ingénieur spécialisé du BTP. Dans l’après-midi, il connaissait les mêmes déboires judiciaires que l’épouse et la fille de René Vestri. Tandis qu’en mairie de Saint-Jean, les enquêteurs de la police judiciaire procédaient à une longue perquisition du bureau du maire.
Sous le choc, hier soir, le sénateur UMP de Saint-Jean se contentait d’un bref commentaire auprès de l’AFP : « La police voulait savoir les liens que j’ai avec M. Alberti. Je n’ai aucun chantier avec lui, je n’ai rien à voir avec lui. »
Officiellement, on n’en saura pas plus. Sauf que la justice semble vouloir démêler l’écheveau des étranges liens qui unissent des élus de la République, des patrons du BTP et des personnages troubles, notamment Giovanni Tagliamento alias « Petite Araignée ».
Commissions occultes et drôles de marchés publics
Et cela, au-delà des fêtes privées dans lesquelles ils se retrouvaient tous régulièrement. Comme en juillet dernier, au Cap Martin, dans la sublime propriété de Chantal Grundig, l’héritière de la fortune du géant de l’électroménager placée, tout comme son compagnon Lino Alberti, en garde à vue depuis mardi matin.
L’affaire aurait d’ailleurs débuté à la suite d’une information transmise par les services anti-mafia de la police italienne sur Tagliamento, considéré de l’autre côté des Alpes, comme « la tête de pont en France de la camorra » (la mafia napolitaine). Ce serait à partir de là que la justice aurait peu à peu déroulé la pelote.
Ce matin à la première heure, les gardés à vue seront transférés au palais de justice de Marseille pour y être déférés.
À moins que certains d’entre eux ne soient remis en liberté, comme ce fut le cas dès hier soir de Roger Mouret. Pour les autres, il était difficile d’en savoir plus, le juge Duchaine comme le procureur Dalleste se murant dans un silence absolu.
Cette opération « mains propres » dans les Alpes-Maritimes est classée ultrasensible. Sans doute parce qu’à tort ou à raison, l’ombre de la mafia plane sur ce dossier. Et qu’on ne badine pas avec ça.
Du coup, alors qu’ils avaient déjà passé de longues heures mardi à fouiller toutes les pièces de la villa Grundig (voir par ailleurs), les enquêteurs y sont retournés hier : à la recherche de nouvelles preuves ? Suffiront-elles à justifier le déferrement et l’éventuelle mise en examen des protagonistes de ce sulfureux dossier ? Mystère.
1. C’est en 1997 et non en 2007 que Gérard Spinelli a été condamné pour abus de biens sociaux. Peine depuis amnistiée.
Retrouvez notre vidéo sur les réactions des Beausoleillois suite à l'interpellation de Gérard Spinelli